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Jeu : Les joutes arrageoises (de la région d’Arras – Pas-de-Calais)

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Joutes arrageoises, photographie de Sandra Saint-Yves.

Joutes arrageoises, photographie de Sandra Saint-Yves.

Il s’agit de joutes nautiques. Ce jeu est pratiqué dans de nombreuses régions de France comme dans le Nord (à Merville, Saint-Omer, Lille), en PACA, dans le Languedoc-Roussillon et notamment à Sète (34), le long du Rhône et en Europe (Allemagne et Suisse).

Lieu d’observation de la pratique décrite ici : Arras, et plus particulièrement le quartier de Méaulens (62).

Description :
Dans le Pas-de-Calais (62), il existe deux clubs de joutes dont l’un à Arras ; deux autres se trouvent dans le département du Nord (59). La Société des jouteurs d’Arras fait partie de la division Nord de Loire-Picardie de la Fédération des Joutes et Sauvetages Nautiques (FFJSN).

Jouteurs, photographie de Sandra Saint-Yves.

Jouteurs, photographie de Sandra Saint-Yves.

A Arras, les joutes se pratiquent selon la méthode arrageoise (les barques sont attirées l’une vers l’autre à l’aide d’amarres) : bien que les bateaux soient munis de moteurs, ils sont ramenés l’un vers l’autre grâce à une corde tirée par les jouteurs qui se trouvent dans la barque. Les cordes sont tendues le long du canal afin de guider les bateaux jusqu’à ce qu’ils se croisent. Les joutes se disputent sur le bassin de Scarpe d’Arras.

Depuis environ une trentaine d’années, dans une volonté d’uniformisation (pour faciliter les compétitions nationales), c’est surtout les méthodes parisienne et alsacienne qui sont utilisées.

Pour la méthode arrageoise, les bateaux de joutes sont prolongés d’une barre d’acier de 6m50 sur laquelle est fixé  le plateau où se tient le jouteur. Les bateaux mesurent alors environ 8m50 de long. Ils sont en acier de 5 cm d’épaisseur et peuvent être utilisés autant lors de la pratique de la méthode arrageoise que de la parisienne.

La méthode parisienne est donc l’une des méthodes officielles adoptées par la FJSN. Les bateaux sont guidés par des barreurs à l’aide d’un moteur. La longueur des lances varie selon la catégorie des jouteurs. Ceux-ci possèdent des plastrons de tissu rembourré de crin. Le jouteur perd quand il tombe à l’eau mais aussi lorsqu’il commet une faute.

La méthode alsacienne est similaires à la méthode parisienne mais les bateaux sont plus longs et ne possèdent pas de moteur. Il faut alors avoir, en plus du jouteur et du barreur, 4 rameurs. Le club d’Arras propose des initiations à cette méthode depuis mai 2009. Il y a souvent une équipe rouge et une équipe bleue.

Dans la méthode arrageoise, des moteurs sont également utilisés lors de l’approche. Des cordes sont tendues sur chaque berge afin de guider les embarcations. Les jouteurs se tiennent debout sur une petite plateforme (« trinquet ») d’environ une cinquantaine de centimètres de long. Le trinquet a une forme de parallélogramme et se rétrécit vers l’arrière. Le but est bien sûr de pousser son adversaire à l’eau. Les jouteurs sont équipés d’un plastron marqué d’une ligne blanche ; toutefois si l’adversaire tape sur cette ligne, il est éliminé même si le joueur tombe à l’eau. Le plastron est constitué de bois. A l’aide d’une longue perche (ou « lances ») de bois flexible terminée par un petit tampon de cuir rembourré, le jouteur doit pousser son adversaire hors de la plateforme. Il ne la tient que d’une seule main, l’autre étant dans son dos. Pour se protéger chaque jouteur possède un plastron fixé par des sangles dans lequel l’adversaire doit enfoncer sa perche afin de pousser le jouteur.

Joutes Arrageoises“, jeu des Joutes arrageoises

Les lances sont en bois de pin de « low », bois résistant aux chocs. Leur taille varie selon les catégories de jouteurs, plus la lance est petite moins le choc est importants. Elles sont différenciées à l’aide de bagues placées au bout de la lance : 1 bague : 2m55 de long pour 32 mm de diamètre, 2 bagues : 2m55 de long pour 36 mm de diamètre, 3 bagues : 3m de long pour un diamètre de 38-40 mm et enfin 4 bagues : 3m55 de long pour un diamètre de 38-40 mm.

Le jouteur se tient debout une jambe tendue vers l’arrière et l’autre fléchie devant lui, le torse droit. Des rebords de bois sont fixés à l’arrière de la plateforme afin que le jouteur puisse prendre appui avec son pied arrière et posséder la force nécessaire à la fois pour rester sur la plateforme mais aussi pour pousser son adversaire.

Un barreur dirige chaque embarcation qui est positionnée suivant l’axe approprié à l’aide des cordes afin que les deux jouteurs se croisent en se faisant face.

Cette méthode arrageoise est utilisée lors de fêtes locales et lors de démonstrations et notamment le 14 juillet à Arras.

Les joutes sont exécutées en présence des trois « Géants » Colas, Dédé et Jacqueline. Les jouteurs sont les gardiens de ces figures emblématiques de la ville d’Arras. Ils « participent » à diverses manifestations et surtout lors du 14 juillet ou la Fête d’Arras. Hors temps de fête, ils sont exposés dans le beffroi de la ville. Ils ont été restaurés plusieurs fois ayant souffert des deux guerres mondiales. Toutefois, ils ont gardé leurs traits d’origine. Leur présence est attestée dans les archives dès 1812, mais il n’est pas exclu qu’ils existaient déjà avant cette date.

Les Géants, photographie de Sandra Saint-Yves.

Les Géants, photographie de Sandra Saint-Yves.

Apprentissage et Transmission :
Les portes ouvertes permettent aux personnes intéressées de s’initier à ce jeu.

A l’origine des grandes familles s’affrontaient lors des joutes qui se pratiquaient alors de génération en génération.

Les enfants peuvent pratiquer ce jeu à partir de 8 ans. Les joutes étaient exclusivement masculines mais se sont peu à peu ouvertes aux femmes.

Des entraineurs  forment les jouteurs et l’équipage.

Objets utilisés et matériaux :
Pour ce jeu, il faut deux embarcations à fond plat avec des plates-formes à l’arrière, deux lances, deux plastrons et des cordages.

Les lances et les plastrons sont en bois de pin « de low » et la municipalité elle-même s’occupe de les fournir. Les bagues des lances sont en métal. Les embarcations sont en acier et également fournies par la ville.

Un petit moteur de bateau permet de diriger la barque.

Terrain de jeu :
À Arras (62), dans le bassin de la Scarpe.

Historique :
Selon nos informateurs, les joutes nautiques sont déjà représentées sur des bas-reliefs de l’Egypte ancienne, de la Grèce antique et de l’Empire romain.

Elles se développent au Moyen-Age. Les joutes nautiques seraient alors inspirées des tournois de joutes pratiqués à l’époque par les chevaliers, les barques ont ici remplacé les chevaux. Les seigneurs et les nobles organisent ces joutes.

Quelques rares traces écrites confirment l’existence de joutes nautiques au Moyen-Age sur le quart sud-est du territoire français contemporain. Plutôt répandues sur le littoral méditerranéen, elles sont très fréquentes dès le XVIIe siècle lors de fêtes royales. Par la suite, plusieurs sociétés se créent et se fédèrent au XXe siècle. En 1971, les joutes nautiques acquièrent l’agrément du Ministère des Sports.

Pratiques locales signalées :
La Société des jouteurs d’Arras a été créée le 12 juillet 1812. Elle est membre de la Fédération des Joutes et Sauvetages Nautiques (FFJSN) et participe aux différentes compétitions nationales. C’est la plus ancienne société de la Fédération.

Actions de valorisation :
- Les joutes se déroulent chaque année lors de la Fête du 14 juillet.

- Bicentenaire de la Société des jouteurs d’Arras célébré les 14 et 15 juillet 2012.

- Démonstrations à l’extérieur de la ville d’Arras.

- Présentation lors de festivals et sur divers sites internet dont celui de la fédération.

- Articles de presse locale.

- Membre de la Fédération des Joutes et Sauvetages Nautiques.

- La Mairie a fait construire en 2012 le Club house d’Arras.

Glossaire :
Trinquet : plateforme ajoutée au bateau et sur lesquels les jouteurs se tiennent pour s’affronter.

Documentation :

Barante, Prosper Brugière, Histoire des ducs de Bourgogne de la Maison de Valois, 1364-1482, 8 vol., Paris, France, Didier et Cie, 1860.

Bertonèche, Patrick, M. Louis Nicollin, Les joutes nautiques en France:: des origines à nos jours, Douarnenez, France, Le Chasse-Marée/Armen, 1998.

SCHWEITZER Emile, Joutes nautiques du 15 août, avant 1870 (Palais Rohan), Strasbourg, Imprimerie alsacienne, 1894.

Kaloutch, Les joutes arrageoises 2011, 2011. http://www.youtube.com/watch?v=JQZI2uAON6w&feature=youtube_gdata_player

Sandra Saint-Yves, MOV00027, 2009. http://www.youtube.com/watch?v=95zsEAokn8U&feature=youtube_gdata_player.


Ce billet correspond à l’une des fiches réalisée dans le cadre de l’inventaire du Patrimoine Culturel Immatériel des jeux traditionnels français, financé par la Ministère de la Culture et de la Communication. Si vous souhaitez ajouter des informations complémentaires à cette fiche, n’hésitez pas à poster un commentaire. Vous pouvez également nous contacter à l’adresse suivante : fiches.pci<at>gmail.com.

Auteur de la fiche d’inventaire : Chloé Rosati-Marzetti (anthropologue).

Informateurs :

Sandra Saint-Yves, Chargée de communication de la Société des jouteurs d’Arras.

Pour plus de renseignements sur la pratique :

Sandra Saint-Yves : sandra.saintyves<at>gmail.com

Jouteurs d’Arras : http://jouteursarras.free.fr

Date et lieu de l’enquête : 22 août 2012, Châteauneuf sur Sarthe

Date de la fiche d’inventaire : 24 août 2012

Crédits photographiques : les photographies publiées sur la page ont été fournies par Sandra Saint-Yves.


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